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LE SURENTRAÎNEMENT: PLUS D'EFFORTS, MOINS DE RÉSULTATS

LE SURENTRAÈINEMENT: PLUS D’EFFORTS, MOINS DE RÉSULTATS
PAR BILL DOBBINS
Comment éviter l’une des erreurs les plus courantes du bodybuilding


Vous ne l’avez peut-être pas remarqué, mais il semble que la façon dont s’entraînent certains bodybuilders aujourd’hui soit complètement à revoir. Les culturistes qui font de la compétition ont toujours eu tendance à penser que “plus” égale “mieux” et que l’excès est la clé du succès. Mais cet “abus de bonnes choses” a pris des proportions inquiétantes. Épuisés par trop de musculation, trop d’heures de cardio et une alimentation insuffisante, des physiques phénoménaux perdent du volume et s’étiolent. Des géants deviennent des pygmées. Du muscle de qualité devient de la viande hachée. Des athlètes qui semblaient sortis tout droit du film Pumping Iron finissent par ressembler à des candidats pour la série Urgences.
“Il ne fait aucun doute,” déclare Jim Stoppani, rédacteur scientifique de M&F, “que beaucoup de bodybuilders continuent de se surmener sur le plan sportif. Ils s’entraînent trop longtemps, trop souvent et ne s’accordent pas assez de temps pour se reposer et récupérer. Résultat, leurs séances ne leur apportent pas des résultats optimaux.”

L’INFORTUNE DE LA DÉMESURE
Stoppani fait remarquer que la réalisation des progrès doit impérativement passer par l’intensité de l’effort, c’est-à-dire qu’il faut contraindre un muscle à travailler à 100% de ses capacités. “C’est cette intensité de l’effort qui stimule l’hypertrophie,” déclare-t-il. “Mais stimuler l’hypertrophie n’est pas réaliser l’hypertrophie. La stimulation (les exercices de musculation) met en route une série de réactions en chaîne dont l’aboutissement est l’hypertrophie proprement dite, phénomène qui n’intervient qu’au cours de la phase de récupération. À cet égard, il est donc essentiel de s’octroyer beaucoup de temps pour récupérer et laisser les muscles grossir.”
On peut aussi exprimer cette relation en rappelant que le niveau d’intensité de l’entraînement détermine l’ampleur de la croissance musculaire. Or, celle-ci n’intervient que pendant la période de repos et de récupération qui s’écoule entre deux séances de musculation. Donc, pour majorer cette croissance, il ne faut augmenter ni la durée ni la fréquence des entraînements, mais l’intervalle de temps consacré à une récupération globale. Autrement dit, il faut s’entraîner pendant des périodes relativement courtes. On laissera ensuite le corps se reposer et se remettre du stress qu’on lui a imposé et on ne refera un entraînement qu’une fois ce processus achevé.
“La récupération n’est pas un processus simple,” explique James Wright, expert en fitness et en physiologie. “Il ne s’agit pas simplement de la récupération des muscles, mais aussi de celle de tout l’organisme. Cela met en jeu énormément de processus métaboliques, trop compliqués pour être exposés ici. Disons seulement que le fait de se sentir fatigué ou non n’indique pas forcément que l’on a récupéré pleinement d’un entraînement. En fait, par auto-conditionnement, on peut continuer de se sentir en forme, même si les séances sont trop longues et trop fréquentes et qu’elles ne produisent pas les meilleurs résultats qui soient.”
Hélas, c’est exactement ce que font la plupart des bodybuilders. Au lieu de s’entraîner en vue d’un développement musculaire maximal, ils imposent des contraintes contradictoires à leur corps, l’une visant la croissance musculaire et l’autre une adaptation à l’endurance. Ils progressent malgré tout, mais pas autant que s’ils ne se surentraînaient pas. En outre, au vu de ces progrès (si minimes soient-ils), ils estiment que leur programme est bon. À l’approche d’une compétition, ils veulent augmenter l’intensité de leurs séances et tendent alors à s’entraîner plus longtemps et plus souvent. En conséquence, le niveau de surentraînement qu’ils atteignent dépasse les capacités d’adaptation de leur corps… et ils se demandent pourquoi leurs muscles paraissent plats, sans volume ni galbe.

LA DÉCOUVERTE DU CODE
Malheureusement, au fil des années, les bodybuilders ont acquis des idées fausses sur la façon dont le corps fonctionne. Si vous discutez avec des compétiteurs immédiatement avant une compétition (ou à des gens qui pratiquent sérieusement la musculation en salle), vous entendrez probablement toutes sortes de théories sur les effets physiologiques qu’ils vont obtenir s’ils limitent ou augmentent leur ration glucidique, s’ils boivent plus d’eau ou moins d’eau, s’ils se privent de sodium, et ainsi de suite, comme si l’organisme était un simple mécanisme réagissant de façon linéaire et univoque à des facteurs tels que l’exercice physique et le régime.
Or, ce n’est pas le cas. Si l’on administre à un rat un surplus de calories pendant 24 heures, il grossira. Si l’on administre à un homme ou à une femme un surplus de calories pendant 24 heures, il/elle pourra (1) prendre du poids, (2) perdre du poids ou (3) conserver le même poids. Le corps humain n’équilibre pas ses comptes au jour le jour comme celui d’un rat. Il est donc tout à fait futile d’essayer de ruser avec lui afin qu’il soit “au top” pour une compétition tel ou tel jour, ou à une heure précise, car il ne fera que ce qu’il voudra, comme il l’entend et peut-être différemment à chaque fois. Au contraire, il faut essayer de créer une “condition optimale” stable qui dure plusieurs jours ou plus si l’on veut réunir assez de facteurs favorables pour avoir un physique irréprochable en vue d’une compétition ou même d’un petit tour sur la plage.
Cette approche est également valable pour l’entraînement. Certains bodybuilders ont réussi à se forger des physiques impressionnants parce qu’ils ont découvert la “programmation” fondamentale qui régit la réaction génétiquement prédéterminée de leurs muscles. C’est une programmation d’une grande précision et le corps se moque de ce qu’on lui dit de faire. Vous composez le bon code, c’est-à-dire que vous vous entraînez de façon à stimuler les muscles de façon optimale, ou vous n’utilisez pas le bon code, un point c’est tout! Rien d’autre ne vous permettra d’approcher de votre vrai potentiel génétique de développement musculaire.
“Quand on a compris cela, la question qui se pose alors est de déterminer le nombre minimum de séries nécessaire pour optimiser l’hypertrophie,” affirmait le regretté Mike Mentzer, M. Univers, dont les avis sur le surentraînement n’ont rien perdu de leur pertinence. “Si on fait une série de plus que le nombre minimum requis pour faire grossir les muscles, non seulement on perd son temps, mais on limite du même coup l’hypertrophie. C’est comme pour le bronzage: une fois qu’on s’est suffisamment exposé au soleil pour stimuler au maximum le brunissement de la peau, toute exposition supplémentaire, ne serait-ce que d’une minute, provoquera une brûlure plutôt qu’un hâle. On cesse de surcompenser et on commence à décompenser ce qui, dans le cas de l’exposition aux U.V, entraîne brûlure, formation de cloques et même la mort.
“La musculation fait intervenir des principes similaires,” pensait Mentzer. “Quand l’intensité est suffisante, il n’est pas nécessaire de s’entraîner longtemps ou de réaliser un nombre excessif de séries et de reps pour produire la stimulation requise. Une fois que le système nerveux reçoit le signal correct assez souvent pour stimuler la croissance, tout stress d’entraînement supplémentaire imposé au corps enclenche le processus de décompensation et non pas celui de surcompensation.”

LA MODÉRATION, CLÉ DU SYSTÉME
La détermination du volume adéquat d’entraînement se fait par tâtonnements. D’après Mentzer, un culturiste devrait d’abord voir comment son corps réagit à une seule série, puis à deux, trois (voire davantage) et mesurer les résultats à chaque fois avant de décider d’ajouter plus de séries à la séance. Bien sûr, la plupart des pratiquants trouveraient ce processus difficile. Mais il est tout à fait clair qu’il est contreproductif de consacrer plus de 30 à 40 minutes au travail d’un grand groupe musculaire et que les petits groupes musculaires (comme les biceps et les triceps) requièrent encore moins de temps que cela.
En fait, c’est là un domaine où les bodybuilders ont commencé à prendre conscience de la démarche à adopter. Lors d’interviews accordées à Muscle & Fitness, des compétiteurs comme Ronnie Coleman, Günter Schlierkamp et Kevin Levrone ont déclaré opter pour des entraînements plus courts et plus intenses que ce qui était considéré autrefois comme la norme. Cela explique en partie pourquoi aucun de ces compétiteurs ne semblait avoir perdu du volume musculaire quand on les a vus sur la scène du concours Olympia.
C’est pour cette même raison qu’aujourd’hui, beaucoup de bodybuilders choisissent de répartir leurs entraînements hebdomadaires sur 4 séances plutôt que trois. En répartissant ainsi le même volume de travail, ils peuvent s’entraîner plus dur et, de ce fait, augmenter l’intensité de leurs séances tout en évitant la “limite de décompensation” dont parlait Mentzer.
Il est en effet préférable de réaliser des entraînements plus courts, mais très intenses. Cela dit, un cycle de 4 jours avec un seul jour de repos représente peut-être encore un volume excessif pour certains pratiquants s’ils s’entraînent effectivement avec une intensité maximale. Nous ne récupérons pas tous à la même vitesse. Pour bon nombre de culturistes, un schéma de travail plus réaliste — surtout pendant la hors-saison — consisterait probablement en deux jours d’entraînement suivis d’un jour de repos, puis de deux jours d’entraînement
suivis de nouveau d’un jour de repos: cela représenterait quatre séances hebdomadaires, chaque groupe musculaire n’étant exercé qu’une seule fois par semaine.
“Les bodybuilders rechignent à essayer un plan d’entraînement de ce genre,” pensait Mentzer, “et encore moins à diminuer davantage leur volume de travail parce qu’à beaucoup d’égards, ils sont devenus ‘accros à la musculation.’ La salle est le centre de leurs activités sociales, c’est l’endroit auquel ils se sont le mieux adaptés, où ils se sentent le plus à l’aise. Un homme qui a des bras de 48 ou 51 cm est la star de la salle, alors qu’à l’extérieur il est souvent considéré comme anormal. La plupart des bodybuilders veulent trouver des raisons de passer le maximum de temps à la salle, mais c’est une habitude qu’ils doivent perdre s’ils tiennent à réussir dans ce sport.” M&F
MARS 2004