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CONVERSATIONS SUR L'OREILLER

De nos jours, on ne peut pas se dispenser de parler de rapports sexuels protégés avec son partenaire.
 
Par David Kalmansohn
 
"Avez-vous des relations sexuelles protégées?"
Voilà une question piège. Qui donc la poserait? Votre médecin? (Il, ou elle, devrait le faire) Vos amis? Bien sûr, si ce sont des journalistes en pleine enquête comme moi, qui profitent de la vie de leurs amis pour leur intérêt personnel. Et vous? Poseriez-vous une question si intime à quelqu'un envers qui vous éprouvez de l'attirance?
Pour les journalistes, une telle indiscrétion fait partie du métier. Comme la plupart des reporters, chaque fois que je dois explorer des sujets d'une nature aussi profondément personnelle, je trouve plus facile de m'immiscer dans l'intimité de mon cercle de proches plutôt que d'essayer de traquer un groupe d'inconnus prêts à tout déballer. En fait, la plupart de mes amis ont appris à se prêter de bon c?ur à mes enquêtes sociales sous réserve d'un anonymat absolu.
Je me justifie habituellement en disant que c'est pour une bonne cause. Cette fois, ce n'était pas différent, le sujet était la communication au lit - ou son insuffisance - en matière de santé, un sujet pas tout à fait secondaire! Après tout, aujourd'hui, comme dans les années 80 et 90, quelques informations - et un peu de latex - peuvent vous sauver de beaucoup plus que d'un léger inconfort urinaire et de quelques piqûres dans les fesses.
J'ai choisi une douzaine de noms dans mon répertoire téléphonique en m'assurant de sélectionner un panel d'âges, de sexes, de revenus, d'études et de zones géographiques variés. La seule chose que mes "sujets" avaient en commun (à part moi) était le soin qu'ils apportaient à leur corps: ce sont des personnes qui fréquentent les clubs de fitness, prennent des compléments diététiques et surveillent leur alimentation. À côté de leur nom et de leur numéro, une liste de questions, courte mais pertinente: Comment abordez-vous votre passé sexuel avec des partenaires potentiels? Comment négociez-vous l'utilisation du préservatif? Discutez-vous du port du préservatif? Utilisez-vous des préservatifs? (Nous utilisons le terme préservatif et non celui de relations protégées, car le préservatif ne protège pas à 100%.) Avez-vous des rapports sexuels?
La dernière question était la plus facile - et la plus sympa à poser - pour commencer. Comme je l'ai constaté, presque tout le monde a ri et répondu à peu près ceci: "pas assez à mon goût", "laisse-moi jeter un ?il à mon agenda" ou "décris-moi ça et je te dirai si ça me rappelle quelque chose."
Après avoir essayé de faire un peu d'esprit, je suis passé à mes autres questions. Dix des douze conversations sont immédiatement devenues gênantes avec, plusieurs fois, des réponses carrément évasives. J'ai insisté, quoiqu'un peu découragé. Ayant livré mes propres batailles avec le démon latex, j'imaginais que tout le monde avait livré les siennes. J'avais tort. Sans surprise, les réponses les plus rassurantes sont venues des personnes exposées de façon directe ou indirecte aux maladies sexuellement transmissibles. Trois des quatre sujets qui connaissaient, ou avaient connu, une personne atteinte du sida utilisaient des préservatifs... la plupart du temps. "Presque tout le temps," selon un; "Tout le temps," m'a dit le second "sauf quand...tu vois" ("tu vois" se révélant être un doux euphémisme pour les pratiques orales). Tandis que le troisième m'informait que lui-même et sa douce moitié (depuis deux ans) utilisaient toujours des préservatifs, mais qu'ils n'avaient en fait jamais abordé le sujet. Le sujet du préservatif n'avait jamais été clairement abordé? Il n'avait jamais été question de faire le test de dépistage du HIV, le virus de l'immunodéficience humaine qui peut conduire au développement du SIDA? En deux ans? "Euh, non," m'a-t-on répondu. "Désolé."
D'abord inquiétantes, les réponses sont vite devenues tout à fait déprimantes. Aucun des autres membres du groupe n'utilisait le préservatif de manière habituelle. La litanie de leurs excuses allait de: "Oh, je déteste ces trucs là" et "Je n'en ai pas toujours sur moi" à "Je ne couche pas avec ce genre de personnes". Et tandis que la majorité du groupe n'éprouvait pas de difficulté à exprimer certains besoins au lit ("plus vite, plus loin, un peu plus à gauche"), deux seulement m'ont convaincu qu'ils parlaient régulièrement du préservatif - après avoir avoué de mauvaise grâce qu'ils avaient contracté respectivement une chlamydiose et une blennorragie. Une autre avait abordé le sujet quelquefois au lit, me dit-elle, mais seulement après avoir eu des rapports sans préservatif.
Après une période bien trop courte de sexualité plus sûre, et même d'abstinence, il semble que nous soyons revenus de nouveau à de dangereuses rencontres, mais bon nombre des acteurs ont changé. Qui est exposé aux risques aujourd'hui? Comme vous le lirez dans "Sex in the City, Country, World" [Le sexe en ville, à la campagne et dans le monde], les jeunes homos (toujours), les ados (toujours), les femmes (plus que par le passé) et les personnes plus âgées (qui devraient le savoir).
Pourquoi donc tout le monde ne vit-il pas une sexualité plus sûre en permanence.
Apparemment, le lien entre le cerveau et le bas-ventre échappe toujours aux personnes chargées d'éducation sexuelle (et aux hommes en général, du moins selon les femmes que je connais). Les experts du comportement humain citent des raisons multiples parmi lesquelles l'estime de soi, l'abus de certaines substances, la colère, la culpabilité, et bien sûr, la dénégation. Ces éléments sont tous des déclencheurs de comportements à haut risque.
Comme de nombreux autres comportements liés à la santé, il y a un abîme entre ce que nous devrions faire et ce que nous faisons en réalité. La plupart des gens savent comment avoir des relations sexuelles plus sûres, mais ils n'utilisent pas obligatoirement des préservatifs. Les efforts d'éducation en matière de protection des rapports sexuels, tout bien fondés qu'ils soient, ont raté leur cible en ce qui concerne certains individus à risques.
Sortez "couvert"
Une partie du problème vient du malaise traditionnel envers la réalité de la sexualité. Et cette réalité c'est, par exemple, que près d'un million d'Américains sont séropositifs au V.I.H., ce virus qui peut provoquer le SIDA. Vous pouvez retourner le calcul dans tous les sens, ça signifie que vous devez porter - ou insister pour que votre partenaire porte - une protection lors de vos rapports sexuels. Le préservatif en latex réduit significativement vos risques d'attraper tout ce qui va de l'herpès au V.I.H. en passant par l'hépatite.
Pourquoi donc ne les utilisez-vous pas, ou n'abordez-vous pas le sujet de leur utilisation? Pour beaucoup ce n'est pas une conversation facile à entamer. Parfois, quand un partenaire évoque le sujet de la responsabilité sexuelle, l'autre peut être sur la défensive, percevant le premier comme exerçant un contrôle, ayant des soupçons ou manquant de spontanéité.
"Utiliser un préservatif?" peut s'étonner un partenaire. "Je suis clean: qu'est-ce qui ne va pas chez toi?" Si vous obtenez ce genre de réaction d'un partenaire sexuel potentiel, demandez-vous sérieusement si cette personne en vaut vraiment la peine. Aucun partenaire n'est assez important pour que vous risquiez votre santé pour lui ou pour elle. Une personne qui ne respecte pas suffisamment sa propre santé pour adopter une conduite plus sûre ou aborder le sujet ne va pas se préoccuper de la santé de son/sa partenaire.
N'attendez pas le moment le plus torride pour penser à vous protéger. Parlez sexe et protection avant d'arriver au lit. Gardez des préservatifs et des lubrifiants à base d'eau à portée de la main dans l'endroit où vous avez des rapports sexuels. Vous devez prévoir à l'avance car la confusion et l'urgence de la situation sexuelle peuvent compromettre votre raison et votre jugement et, pour finir, votre santé.
Par conséquent, parlez-en!
 
Davis Kalmansohn est rédacteur adjoint du magazine MEN'S FITNESS.

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