Muscle & Fitness - Le magazine pour être plus fort, en forme et en meilleure santé
Accueil | Archives d'articles | Abonnement | Nous contacter | Publicité
LE RÉGIME ALTERNÉ

JANVIER 2005


LE RÉGIME ALTERNÉ
Faites fluctuer vos apports caloriques pour booster votre métabolisme
PAR CHRIS STREET

L’obligation de surveiller son alimentation empoisonne souvent la vie des bodybuilders car il s’agit de perdre du gras sans céder de muscle, objectif impossible à réaliser avec les régimes classiques. On se retrouve prisonnier d’un cercle vicieux où la réduction des calories finit par ralentir le métabolisme. Résultat, le physique écorché auquel on aspire semble inaccessible.
Nous allons vous présenter une démarche nutritionnelle qui n’implique ni restrictions draconiennes, ni séances de cardio-training interminables. En fait, avec ce programme, le volume alimentaire est fréquemment élevé. Non seulement, on mange de façon intelligente (ce qui satisfait le palais et avantage la silhouette), mais on peut contrôler son poids de façon permanente. On peut y parvenir à l’aide d’une méthode dite régime en zigzag ou régime alterné: elle consiste à augmenter et à diminuer judicieusement les apports caloriques de manière à stimuler le métabolisme et à amener le corps à brûler le maximum de graisses tout en préservant au mieux le capital musculaire. Cette stratégie présente surtout l’avantage d’être facile à appliquer. Trop beau pour être vrai? Lisez donc ce qui suit pour découvrir comment avoir un physique mince et musclé avec le régime zigzag.

>> LA SURVIE DES PLUS GRAS
Un régime classique provoque une perte de graisse, généralement accompagnée d’une fonte musculaire: à l’issue d’un programme basses calories, on pèse moins (du moins pendant quelque temps), mais on affiche un pourcentage de graisse plus élevé qu’auparavant en raison de la diminution de la masse maigre (le corps commence à dégrader les acides aminés des muscles pour se fournir en énergie). Pire encore, une fois que l’on revient à un schéma alimentaire normal, on s’aperçoit que le corps a une plus forte tendance à stocker les calories supplémentaires sous forme de tissu adipeux! La raison est que, sous l’effet de la baisse de l’apport calorique, l’organisme ralentit son métabolisme afin de ne pas perdre de graisse.
Ce mécanisme de survie remonte à l’époque où nous étions chasseurs-cueilleurs. Comme mode de stockage de l’énergie, la graisse est très efficace: notre physiologie a évolué de manière à la conserver et ce, depuis l’époque où la nourriture était rare et où seuls les êtres humains qui avaient le plus de graisse disposaient d’un avantage au plan de l’évolution de la race. C’est ce que les scientifiques désignent par les termes “effet de famine:” si cet effet était bénéfique pour l’homme des cavernes, il est particulièrement néfaste quand on cherche à avoir une silhouette affinée. La solution consiste donc à faire croire au corps qu’il dispose d’un surplus de nourriture. En théorie, cela maintient un métabolisme élevé (combustion des graisses et pas de stockage) et épargne, en même temps, le précieux tissu musculaire qui a été acquis.

>> DES PREUVES À L’APPUI
Je serai franc avec vous: le régime zigzag n’a fait l’objet d’aucune étude spécifique, mais cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas en explorer les possibilités. Par contre, de très nombreuses recherches ont été effectuées sur la façon dont l’organisme réagit à différents apports caloriques, à l’apport des macronutriments et à l’activité sportive. Par exemple, des travaux conduits au Centre de recherche sur la nutrition à l’université de Limburg, Maastricht (Pays-Bas), ont montré que la suralimentation augmente l’activité du système nerveux sympathique, accélérant de ce fait le métabolisme des sujets. Aux USA, des recherches menées au Pennington Biomedical Research Centre and School of Human Ecology ont révélé clairement que notre corps adopte différents mécanismes d’utilisation de l’énergie selon que l’on suit un régime hypocalorique ou hypolipidique.
Le fait qu’une consommation élevée ou faible de sucres provoque des changements physiologiques ne vous étonne certainement pas et vous ne serez pas, non plus, surpris d’apprendre que la variation de l’apport protidique se traduit par des réponses organiques différentes. Dans une étude, on a analysé les adaptations du métabolisme de la leucine et du glucose à trois jours de jeûne chez six jeunes gens en bonne santé: on a constaté une amplification de la dégradation des protéines et une oxydation de la leucine dans un laps de temps très court. Chose intéressante, cette étude a également fait apparaître une chute de 8% du métabolisme au cours de la période de jeûne.
À l’autre extrémité du mode alimentaire, des études sur la suralimentation ont montré que cette surcompensation augmentait la masse maigre et le taux plasmatique des hormones anabolisantes. Dans une étude sur des sujets féminins, on a noté une élévation de la masse maigre et des taux d’IGF-1, de testostérone et d’insuline au terme de trois semaines de suralimentation. Bien sûr, il n’est pas question de multiplier les excès de nourriture ou de prolonger ce type de régime pendant trop longtemps, sauf si vous privilégiez le look “zéro abdos.”

>> IL NE SUFFIT PAS DE MANGER MOINS
Puisque nous savons tout cela, l’étape suivante consiste à extrapoler à partir de ces recherches afin de pouvoir tirer le meilleur parti des changements physiologiques induits par ce que l’on mange et par les quantités consommées. Toutefois, avant d’aborder ce sujet, je vais vous expliquer pourquoi manger moins ne constitue peut-être pas la meilleure démarche: si l’on se contente de diminuer les calories et les protéines (comme c’est le cas des régimes classiques), on assiste à une chute des concentrations d’hormone de croissance, d’IGF-1, d’insuline et d’androgènes, autant d’effets qui ne sont certainement pas propices à la prise de masse musculaire.
Dans cette optique, il est évident qu’en suivant des cycles de sous-alimentation et de suralimentation (avec de courtes périodes de modification des apports protidiques, lipidiques et glucidiques), on peut provoquer une réponse adaptative qui se traduira par une diminution de la masse grasse et par davantage de muscle. Les bienfaits ne s’arrêtent pas là. Vous savez comme moi qu’observer un régime peut être ennuyeux, c’est le moins que l’on puisse dire. Susan Kleiner, conseillère en nutrition auprès de nombreuses équipes sportives et auteur de Power Eating (Human Kinetics), considère qu’un mode alimentaire alterné est bénéfique. “Bon nombre de bodybuilders adoptent des régimes draconiens,” explique-t-elle. “Il peut parfois leur arriver d’avoir du mal à tenir jusqu’au bout de la semaine. Si l’on observe un régime aussi extrême, le fait de pouvoir changer de rythme et de transformer son mode alimentaire pendant un certain temps peut, à défaut d’autre chose, aider énormément sur le plan psychologique.”

>> LE PROGRAMME
Il est clair que pour rester mince, la solution n’est pas d’adopter une démarche diététique extrême, mais d’élaborer une stratégie nutritionnelle facile à suivre et adaptée au mode de vie de chacun. Laissez donc tomber les régimes avec leurs effets “perte de poids-reprise de poids” et optez pour l’approche zigzag. Il faut viser un équilibre alimentaire et faire preuve de bon sens. L’approche zigzag (ou cyclique) est, en fait, une stratégie de longue haleine et non pas un “régime” au sens habituel du terme: elle permet de moduler l’apport calorique d’une semaine sur l’autre afin que le corps devienne — à vie — une machine à oxyder les graisses et à faire du muscle.

>> COMPTER LES CALORIES
Pour démarrer le programme, il convient de déterminer le nombre de calories que vous consommez chaque jour. Faites un suivi sur sept jours en notant tout ce que vous mangez au cours de la semaine, puis totalisez les calories et divisez par sept: vous obtiendrez la moyenne journalière. Ainsi, si vous avalez 17 500 calories par semaine, cela correspond à une moyenne de 2 500 calories par jour: ce chiffre représente le nombre de calories nécessaires pour maintenir votre poids de corps actuel et nous l’utiliserons comme point de départ de la méthode zigzag.

>> COMMENT MANGER
Une fois que vous aurez calculé votre apport calorique journalier, l’étape suivante consiste à analyser les quantités de lipides, de protéines et de glucides consommées quotidiennement. Les lipides sont particulièrement importants puisqu’ils apportent plus de calories par gramme que n’importe quel autre nutriment (9 Kcal par gramme, comparé à 4 pour les glucides et autant pour les protéines). Pour mincir, il est bon de commencer par diminuer les calories en mangeant moins de matières grasses. En règle générale, je recommande aux bodybuilders de faire en sorte que seulement 15% du total calorique quotidien soit issu des graisses alimentaires.
Naturellement, quand on cherche à conserver la masse maigre tout en éliminant du gras, les protéines jouent un rôle fondamental. Parmi les sources de qualité, citons le blanc de poulet sans la peau, le poisson, le blanc de dinde, le blanc d’œuf, le bœuf maigre et la whey protéine. Votre apport protidique journalier devra être d’environ 2,2 g par kilo de poids de corps.
Si les protéines sont essentielles pour construire du muscle et le préserver, les sucres fournissent le carburant nécessaire dans la pratique du sport de la fonte. Si le corps ne dispose pas d’assez de glucides à des fins énergétiques, il n’hésite pas à s’approvisionner en puisant dans le tissu musculaire. Pivot de votre programme d’entraînement, les glucides devront être apportés par des aliments tels que les flocons d’avoine, le pain complet, le riz, les pâtes, les pommes de terre et les fruits. Évitez les produits raffinés comme les boissons sucrées et les pâtisseries industrielles. Environ 6,6 g/jour de glucides par kilo de poids de corps devraient suffire: cette quantité sera majorée ou minorée selon que vous êtes en phase hypercalorique ou hypocalorique.

>> MANGER MOINS, BRÛLER PLUS
Pour perdre du tissu adipeux, il faut mettre en place un déficit calorique, mais cette réduction sera modulée. Le principe du régime zigzag est de jouer sur la tendance naturelle du corps à ralentir son métabolisme dès qu’il perçoit un état de famine. En augmentant et en diminuant les calories de façon systématique, on peut exploiter ce mécanisme de survie de façon positive. Grosso modo, on empêche la perte de poids de stagner tout en préservant le volume des muscles squelettiques.
Il est capital de garder du muscle parce que c’est le régulateur métabolique du corps. Plus on a de masse maigre, plus on brûle de calories au repos et pendant l’effort. N’oubliez pas que le muscle, tissu vivant, est une véritable chaudière à calories. Si l’on veut que le pourcentage de masse grasse soit faible, il faut avoir un maximum de muscle.

>> LE ZIGZAG: MODE D’EMPLOI
Votre apport calorique moyen étant connu, vous commencerez par diminuer les calories progressivement. Ce processus se fait lentement et il faut six semaines pour atteindre l’objectif d’une réduction de 500 calories par jour. Ce n’est pas une solution rapide, mais il est essentiel de procéder de cette façon. Pour conserver un maximum de muscle, la diminution doit être lente et régulière. Prévoyez 4 à 6 repas par jour, en fonction de votre emploi du temps. En faisant des repas fréquents, vous pourrez répartir vos calories de façon égale au cours de la journée et avoir toujours beaucoup d’énergie tout en assurant un afflux constant d’acides aminés destinés aux muscles très sollicités par l’entraînement.
Démarrez par une diminution de 300 calories: vous y arriverez facilement en éliminant des produits très lipidiques, comme les assaisonnements, la mayonnaise, le beurre et la margarine. Au bout de quatre semaines, supprimez 200 calories de plus par jour: votre réduction totale sera donc de 500 calories.
Après deux semaines de déficit de 500 calories, vous pouvez entamer le zigzag. À mesure que votre métabolisme ralentit à cause de “l’effet famine,” vous allez passer en mode hypercalorique: il vous suffira de consommer à peu près 200 calories supplémentaires pendant environ trois jours, puis de revenir à un déficit calorique pendant une semaine.
D’après Tobin Watkinson, nutritionniste clinique diplômé, “la période entre les deux modes alimentaires est cruciale. Il se peut que le corps soit prêt à s’adapter au bout de 3 à 4 jours. Il importe donc que le changement intervienne avant que le poids de référence ne soit atteint.” Il s’agit là du poids biologique personnel (pondérostat) vers lequel le corps de chacun tend naturellement. Vu que le timing est très important, il faut veiller à ce que ce point d’équilibre soit atteint au bon moment. Comme nous sommes tous différents, je ne peux faire que des recommandations générales. Essayez plusieurs périodes de durée différente afin de voir comment vous réagissez.
Ce sont les sucres complexes qui devront fournir ces calories supplémentaires que vous répartirez sur les trois premiers repas de la journée, en veillant à ce qu’un de ces repas soit pris après l’entraînement. Conseiller nutritionnel auprès d’athlètes d’élite, Eric Derrano précise que l’augmentation des glucides tous les deux jours peut faciliter le développement musculaire et favoriser la récupération. “Le régime alterné est un programme qui empêche un appauvrissement trop important des réserves de glycogène,” souligne-t-il. “Je préconise des journées à fort apport glucidique lorsque l’on travaille de grands groupes musculaires comme les jambes ou le dos. De cette façon, on évite un surentraînement qui risquerait d’être provoqué par une restriction calorique chronique.”

>> SOLUTION PERMANENTE
Pour que la méthode zigzag soit efficace, il ne faut pas précipiter le mouvement. Si vous voulez rester mince et musclé toute l’année, vous devez modifier votre métabolisme et votre composition corporelle de façon permanente. La seule façon d’y parvenir est de préserver le muscle tout en éliminant du tissu adipeux. L’atout de l’alimentation alternée est qu’elle peut même contribuer à une prise de muscle au cours des périodes de perte de graisse.
Il ne s’agit donc pas là d’un régime que l’on entreprend pour le stopper quelques mois plus tard. Pour retrouver la ligne, il convient d’adopter une nouvelle démarche, établie à partir de données scientifiques prouvant qu’une alternance des modes d’alimentation permet de tirer parti du potentiel caché de notre corps à brûler les graisses. Peu conventionnelle, certes, la méthode zigzag garantit plus de muscle et moins de graisse que les régimes traditionnels. Comme dans d’autres domaines de la vie, c’est parfois au bout de la voie la moins fréquentée que l’on trouve les plus grandes récompenses. M&F

BIBLIOGRAPHIE
›› Di Pasquale, M. Amino acids and proteins for the athlete: the anabolic edge. New York, NY: CRC Press, 1997.
›› Dulloo, A.G., Calokatisa, R. Adaptation to low calorie intake in obese mice: contribution of a metabolic component to diminished energy expenditure during and after weight loss. International Journal of Obesity 15:7–16, 1991.
›› Forbes, G.B., et al. Hormonal response to overfeeding. American Journal of Clinical Nutrition 49(4):608–611, 1989.
›› Maughan, R.J., et al. Diet composition and the performance of high-intensity exercise. Journal of Sport Science 15(3):265–275, 1997.
Nair, K.S., et al. Leucine, glucose and energy metabolism after 3 days of fasting in healthy human subjects. American Journal of Clinical Nutrition 46(4):57–562, 1987.
›› Rothwell, J., et al. Hormonal and metabolic responses to fasting and refeeding. International Journal of Obesity 9(Suppl 2):49–54, 1985.
›› Roy, H.J., et al. Substrate oxidation and energy expenditure in athletes and nonathletes consuming isoenergetic high- and low-fat diets. American Journal of Clinical Nutrition 67(3):405–411, 1998.
›› Saris, W.H. Effects of energy restriction and exercise on the sympathetic nervous system. International Journal of Obesity and Related Metabolic Disorders 19(Suppl 7):S17–S23, 1995.